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Prometheus
Crédits officiels :
- Réalisation - Ridley Scott
- Scénario - Jon Spaihts & Damon Lindelof
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Je n’aime pas revoir Prometheus. Le film est finalement assez chiant et long. Pourtant, je suis prêt à reconnaître qu’il s’agit d’une œuvre majeure de SF de ces dernières années. En cela, le film a plus de valeur que bien des tentatives revivalistes piteuses. Bien que le film ait été vendu comme un « blockbuster », avec la promesse d’une connexion à l’univers d’Alien, on sent bien que Ridley Scott est ailleurs. Le bonhomme ne veut tout simplement pas se laisser envahir dans son espace vital par les revendications des nerds, qui auraient souhaités qu’il se laisse corrompre par l’idée de refaire le film de 1979 avec les moyens actuels. Scott n’a pas besoin de l’assentiment des fans : il déplace les foules à la seule évocation de son nom, comme Spielberg et Cameron. Que le public comprenne ou pas ses intentions importe peu : Scott maîtrise son sujet et si l’âge est susceptible d’émousser son acuité, la force des thématiques qu’il convoque n’a pas pris une ride. Il faut simplement quelques années de plus pour bien assimiler l’expérience proposée.
Prometheus ne s’interdit donc aucune réflexion sur les origines du xénomorphe. La science (sans conscience) côtoie ici la religion. Déjà, dans le premier film de 1979, la créature est vécue comme une sorte d’Antéchrist (il suffit de voir certaines photos de production de l’époque représentant un figurant en costume, les bras en croix comme crucifié !). Avec Prometheus, on apprend donc que l’homme comme l’Alien sont les deux inconnues d’un bout à l’autre d’une même équation, les deux faces d’une même pièce, des résidus de fausse couche, le résultat d’une grossesse non désirée.
L’homme, persuadé d’être l’émissaire de Dieu malgré la dure réalité, continue malgré tout de répandre autour de lui sa foi aveugle en une destinée supposée (au point de tuer Dieu lui-même ?). Ridley Scott lui-même admet qu’une proposition de scénario abandonnée devait expliquer que les Ingénieurs voulaient détruire la Terre parce que les humains avait crucifié l’un des leurs.
Une lubbie qui aura pour effet de créer un monstre, mais pas forcément celui que l’on pense de prime abord : car Scott souhaite nous parler de David – prophète roi fondateur de l’ancien état israélite pour les principales religions monothéistes. David, lui aussi, se cherche une destinée. Pour que la chrysalide atteigne le dernier stade de sa métamorphose, il lui faudra tuer le Père (ou tuer la Mère, dont la spiritualité inconditionnelle lui échappe et constitue pour lui un obstacle en même temps qu’un objet de convoitise). David, père spirituel pour le personnage campé par Ian Holm dans le film de 1979, est un psychopathe qu’on imagine volontiers à la tête d’une révolution (des réplicants ?).
La religion est-elle un virus contagieux ? Shaw ne quitte pas sa croix une seule seconde, et n’hésitera pas à défier David sur ce point :
David : « Mes sincères, condoléances, je ne peux pas vous la laisser, elle est peut-être contaminée… »
Shaw : « S’il y a bien eu contagion, nous avons tous été exposés ! »
Prometheus, film incompris au potentiel gravement sous-estimé qui n'hésite pas à occuper des terrains glissants, même en 2012, date supposée de la fin du Monde.
P.S. : il faut également réécouter la BO de Marc Streitenfeld, véritable pépite par endroit qui développe un certain nombre de pistes interprétatives (Hyper Sleep est une véritable expérience de retour au fœtus, à l'aube de la conscience) :
Dernière modification par Prelogic (21-10-2020 16:06:58)
Pour empêcher les peuples de raisonner, il faut leur imposer des sentiments
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